I.101 – N’ayez pas peur !
« Abandonnez le négatif et cultivez la vertu » ! Le bouddhisme tibétain est pétri de ce leitmotiv. Mais, n'est-il pas curieux de devoir purifier ce qui par essence est « libre d'assertion » et de contrôler ce qui est au-delà de toute sujétion ! Et si « maîtriser son esprit », c'était sortir du contrôle ?

Un maître n'est pas quelqu'un qui fournit du matériel à votre approbation, c'est quelqu'un qui paralyse votre système de pensée par l'absence de système LGSE-20
Hommages, offrandes, prosternations, supplication du maître racine, récitation de mantras, dédicaces, autant de pratiques et de rituels qu'il faut répéter plusieurs fois par jour, mieux encore à chaque date d'un calendrier estampillé bénéfique à l'accroissement des mérites (par 100, par 1000, etc.). Si vous ne pratiquez pas, vous n'obtiendrez aucun résultat ! Vous ne pourrez pas développer la sagesse et la compassion, et vous n'obtiendrez aucune réalisation spirituelle... Pire, si vous ne faites rien pour maîtriser votre esprit, c'est lui qui vous dominera !
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous êtes là, dans cette vie dont l'existence est conditionnée par le karman - de propulsion et de réalisation -. « L'ennemi, c'est l'ego, qu'attendez-vous pour le combattre ! Devenez un vainqueur, atteignez l'état de Bouddha ! Il n'y a d'alternative que la souffrance ou l'Éveil ! ».
- Mais est-ce du contrôle que de chercher à se libérer du mental-ego ?
- Utiliser le « simple je » pour se libérer du mental-ego semble logique en effet, mais si cette logique imparable masquait un accès plus... direct ?
Si la lumière ne perçait pas les ténèbres, il serait impossible de trouver le chemin pour sortir de l'obscurité. Mais, la lumière peut aussi être aveuglante, et il nous faut prendre garde à ne pas confondre son éclat avec ce qu'elle éclaire...
Le Bouddha Sakyamuni a lui-même utilisé ce levier, car la plupart des personnes sont sous l'emprise de « la saisie (innée) du soi », de leurs propres affabulations, et de fait sujettes à la manipulation de mystificateurs patentés... Dans le Kalama sutta, le Bouddha nous met en garde de ne pas croire aveuglément, et nous incite à nous questionner avec discernement. « Ne vous fiez pas à ce qui a été acquis du fait de l'avoir entendu de façon répétée ; ni du fait de la tradition ; ni du fait que ça se trouve dans une écriture ; ni du fait d'une supposition ; d'un axiome ; d'un raisonnement spécieux ; d'un parti-pris en faveur d'une notion à laquelle on a pu réfléchir ; de l'apparente habileté de quelqu'un d'autre » KAL.
Ce sutrā nous invite à entreprendre un questionnement épistémologique de la connaissance c.à.d. « l'étude critique des postulats, conclusions et méthodes d'une science particulière[i] » (ou l'analyse critique de l'enseignement, des textes, de leurs commentaires, et de la parole des maîtres), mais aussi à l'examen de notre capacité à appréhender cette connaissance, qui passe par l'interrogation de ses modes d'acquisition (l'écoute, la lecture, la réflexion), et à travers eux à questionner la relativité de nos consciences sensorielles et mentale.
En voyant les choses comme des « existant premiers », qui peuplent et forment un monde intrinsèque autonome, nous nous attachons au désir de connaître leur nature ontologique. Or, les limites de notre connaissance sont celles de notre définition du monde (sur la base de son expérience), lequel est coémergent à l'esprit, dont il manifeste la forme, les aspects et les modalités de l'acte de connaissance. « Il n'y a que les objets des sens qui puissent nous être donnés [...] ils ne peuvent l'être que dans le contexte d'une expérience possible[ii] ».
L'incitation à un usage raisonné du « doute critique » appliqué à la connaissance comme objet épistémique (pensée logique et expérience sensible) est également une exhortation à dépasser, plus subtilement encore dans cet examen, la perspective subjectiviste et dualiste que nous avons des choses, sous le point de vue égocentré que nous avons de nous-mêmes...
- Ne croyez pas sur la foi de vos seules perceptions car elles sont entachées de subjectivisme, sur la foi du sentiment de votre « intime conviction » car il est imprégné de dualisme, sur la foi de ce qui vous apparaît lors de la dissolution de vos agrégats au moment du « processus de la mort» ou sur la foi du témoignage de ceux qui l'ont approché car ils sont placés sous le sceau d'une conscience qui se perçoit comme entitaire, nouménale, autonome...
Les mourants, souvent, perdent le contact avec ce qui les entoure pour entrer dans un monde hallucinatoire qui leur est propre et les tourmente à différents degrés. D'où proviennent les visions qu'ils ont alors ?
Au moment de la mort, l'esprit est en effet en proie à toutes sortes de phénomènes hallucinatoires. Le mourant vit une sorte de rêve, mais il prend pour réel ce qui lui apparaît et, le plus souvent, il en conçoit de la frayeur et de la souffrance. La nature de ces visions n'est pas arbitraire. Elle dépend des conditionnements formés au cours de cette vie aussi bien par les actes que nous avons accomplis que par les paroles que nous avons prononcées, ou les pensées que nous avons nourries.
Bokar Rinpoché, Mort et art de mourir

- Que reste-t-il lorsque l'on
élimine tout ce qui fait que l'on se pense « soi » ?
- Tout le reste ! Le tout qui n'est pas « un », la totalité qui n'est pas un « tout » !
Cette analyse épistémologique ne vise pas à nous permettre de déterminer sur quel(s) critère(s) de validité baser nos conclusions, afin d'accorder un crédit recevable à la connaissance des choses mais, en paralysant notre système de pensée (tout ce en quoi nous avons implicitement confiance), à nous mener à l'extase, c.à.d. littéralement à « sortir de », la perspective du moi, réductrice et fragmentaire, pour passer d'une vue modale (subjective et duelle) à une vue amodale (non-référentielle, non locale et atemporelle).
- Recherchez la coémergence ! Dans le rêveur voyez le miroir du rêve, dans le reflet voyez la lumière, dans le tour de magie voyez l'art du magicien, dans la relativité des apparences voyez le « miroir de la vacuité » de l'esprit !
Le premier enseignement du Kalama sutta, c'est le rôle déterminant de l'esprit comme cause de la souffrance et du bonheur, c.à.d. l'infaillibilité de la loi de cause et effet du karman. « Soyez vous-mêmes le maître de votre esprit. C'est son propre esprit qui fait d'un homme un Bouddha ou qui en fait une bête ».
Le second enseignement porte sur la vacuité, laquelle ne peut être séparée de la production interdépendante puisqu'elles sont une seule et même chose, et dont la vérité est purement conventionnelle puisque l'essence de toutes choses est... « libre d'assertion » ! L'ignorance, c'est l'erreur de croire réelle ce que nous donne à voir les sens et le mental, sans voir qu'il s'agit d'une illusion issue d'une autre illusion. Le soi est une simple apparence dans le miroir d'une perspective illusionnée. La Lune dans le lac est un simple reflet sur le miroir de l'eau, comme la carte est la représentation du territoire. Ses caractéristiques (forme, couleur, etc.) et ses modalités (clarté et netteté des détails et de l'ensemble) sont relatives aux conditions d'éclairage et aux conditions de réverbération de l'eau. Le reflet dépend pour exister de ce qui est perçu comme un objet par une conscience qui se perçoit sujet sous l'angle de la dualité, «trompé par l'erreur et les apparences, on devient un démon ; illuminé, on devient un Bouddha».
Opérants et efficients dans leur référentiel, ce ne sont là... que des reflets ! Lesquels révèlent leur véritable nature dans le « miroir de la vacuité » où se dissout la discontinuité de l'objet et de la conscience dans une saisie sans obstruction. Le troisième enseignement, c'est de ne pas enfermer l'esprit dans le contrôle mental, « ne le laisser pas s'écarter du Noble Chemin », Nagarjuna l'a énoncé, qui est le juste milieu entre dualité... et non-dualité !
Manichéenne, la conscience mentale trompe la conscience non duelle afin de l'amener à se conformer à ses croyances. Lorsque la conscience spontanée se contracte, une perspective égocentrée se forme alors, qui se saisit « sujet », se croit entitaire, se pense nouménale, s'affirme autonome !
L'expérimentateur dont la conscience est contractée perçoit l'univers sous sa forme contractée.
La conscience absolue devient conscience individuelle par cette contraction même, provoquée par les objets de conscience LGSE-118

Sous couvert de transformation spirituelle, son émanation (le mental-ego) édifie des systèmes de pensées qu'il affirme « philosophiques » mais qui se veulent religieux, comme un lien (ligare) d'allégeance et de soumission ! Lien à l'appui duquel il affirme : « l'esprit n'est pas le corps ! » ; cherche à vous faire peur en vous faisant croire que vous « n'actualiserez pas le potentiel de votre nature » si vous ne maîtrisez pas votre esprit ; si vous ne le purifiez pas ; ni n'usez contre la colère de l'antidote de la patience, contre la distraction celui de l'attention, etc.
- Pourtant, la force mentale est un puissant levier pour affronter les obstacles, surmonter l'adversité, dépasser ses limites et escalader les sommets ?
- Face à la montagne, vous dites-vous « c'est moi et la montagne » ? Entrez-vous dans une opposition duelle, un combat pour vaincre vos réticences, vos peurs, votre douleur et votre souffrance, pour « conquérir » le sommet ?
Pour le bouddhisme tibétain, l'intention est primordiale. C'est grâce à la motivation adéquate - qui dans le Mahāyāna consiste dans le souhait de libérer tous les êtres sensibles de leurs souffrances - que la transformation de l'esprit qui amène à l'état de Bouddha est possible, sans quoi les rituels sont vides ! Mais, qu'elle soit purement égoïste, altruiste ou de compassion, l'intention n'en demeure pas moins, par construction, une pensée tournée vers un objectif, laquelle est par définition... une conception de l'esprit !
La conscience non duelle ne vise rien, ne cherche rien, ne retient rien, elle réside simplement dans le flux, local et temporel, d'abord de « l'ici et maintenant », puis non local et atemporel où la totalité indivise et asubjective s'écoule, laquelle est la nature véritable de l'esprit. La vague est-elle différente de l'océan, la tornade de l'air, l'origami du papier plié, la lettre calligraphiée du tracé du pinceau ?
Sous l'égide du mental-ego, l'objectif d'atteindre le sommet peut aisément se muer en désir-attachement, gonfler l'orgueil, nourrir la jalousie, et instiller d'autres émotions perturbatrices, dans une opposition croissante entre soi et les autres...
Plus qu'une simple tendance, qui de latente deviendrait manifeste dans certaines conditions précises (sous l'impulsion du karman de réalisation), c'est également par construction que le mental-ego se focalise sur un événement, convoite le futur, le glorifie, fige le passé et ce faisant... occulte le chemin !
- Si le souvenir du sommet disparaissait alors que la mémoire de l'ascension demeurait vive, diriez-vous que cela vaut tous les efforts et toutes les souffrances que vous avez dû endurer... sans aucun souvenir de vous être dépassé ?
- On peut se dépasser à chaque pas et en garder le souvenir...
- Ce qui démontre que l'instant présent est le lieu de l'extase ! Marcher sans qu'il n'y ait de marcheur, penser sans qu'il n'y ait de penseur...
Du point de vue relatif, il n'y a seulement l'instant. Attendre du futur, se souvenir du passé ne sont que des conceptions mentales de la conscience duelle. La destination est le chemin, lequel est la perspective... de la destination !
Cessez de penser de manière linéaire ! Ultimement, il n'y a jamais rien eu qui soit « sur le chemin du devenir », « en cours de transformation » ou « en voie de réalisation ». Ce ne sont que des « effets de perspective » produits par l'esprit illusionné par sa propre affabulation ! « Les phénomènes n'ont pas de caractéristiques, ils ne sont pas créés, ne cessent pas, ne diminuent pas, n'augmentent pas, ils n'ont pas d'impuretés, ne sont pas sans impuretés » EPS.
- Nous avons besoin du conventionnel pour réaliser l'ultime. Le Kalama sutta est une incitation mentale à douter de tout ce qui est le produit... du mental, c.à.d. de toute intentionnalité, pour dépasser y compris la doctrine du Bouddha !
Pour prendre la mesure du fait que, du point de vue relatif, toute chose est à la fois pure et impure, (à l'instar d'un chapeau noir avec une plume rouge sur votre tête) visualisez de l'or ou un diamant au sein de votre conscience mentale. Cette vision vous inspire à la fois de la fascination et du désir-attachement. Maintenant, imaginez cet or... couvert d'excréments ! Le dégoût et l'aversion que vous inspire cette simple image est aussi le premier sens de l'enseignement du Kalama sutta.
En vérité ultime, l'or et la merde ont la même essence, vacuité d'existence propre, autrement dit (rappelez-vous qu'il ne s'agit pas d'obtenir votre approbation, mais de paralyser votre système de pensée...) un « goût unique » ! Ne soyez toutefois pas trop paralysé par cette vision, et reconnaissez que ce n'est que du fait d'un « effet de perspective » que le pur et l'impur vous apparaissent distincts, séparés mais non séparables. C'est le troisième sens du Kalama sutta.
- Ce qui dérange les uns et qu'ils désignent comme « perturbation mentale » s'avère en réalité être une affirmation du mental dont ils sont sous l'emprise !
- Il faut développer le « Calme mental » pour atteindre à la concentration, et alors par la « Vision supérieure », il est possible de dissoudre cette dualité...
- « Développer », « atteindre », autant d'objectifs et de conceptions mentales ! Méditez-vous comme le marcheur qui gravit la montagne en lutte contre sa propre souffrance ou vous écoulez-vous simplement dans le flux mouvant de l'esprit ?
« Une seule chose est l'essence de toutes choses et toutes choses l'essence d'une seule ! ». En essence, une pensée « perturbée » n'est pas différente d'une pensée apaisée, un esprit agité d'un esprit calme, un état d'agitation et de distraction du samādhi, les passions des sagesses, etc.
Est-ce que le maître expose l'ultime secret ?
Sans discernement, serai-je libéré ? se disent-ils.
Les adeptes vont et viennent. Ils errent dans leurs pratiques et commettent l'erreur de ne pas reconnaître le Spontané LGSE

- A cet instant même, « je suis Bouddha » et le disant... je ne le suis pas !
Il y a l'expérience pure qui est une pensée sans penseur, et l'affirmation qui est mentale parce qu'elle est le fruit d'un penseur qui se pense sujet à propos d'une l'expérience dont il fait l'objet. Selon l'angle sous lequel il est perçu, tout apparaît soit, ultimement, d'une même essence (où expérience et pensée, apparence et esprit sont coémergents), soit relativement de natures opposées (signifié versus signifiant, objet versus sujet...).
Ils ne sont pas deux, ils ne sont pas incompatibles et il ne s'agit pas de rejeter l'un au profit de l'autre. Pur versus impur est une tromperie dualiste ! « Libre d'assertion » signifie par définition (laquelle n'est vraie que du point de vue relatif), que rien ne peut être affirmé « vrai » ni infirmé « faux » ! Si vous croyez cette affirmation vraie, vous n'avez pas encore saisit ! « Tout est vrai, non vrai, ni vrai ni non vrai, ni aucun des deux » ! Vous devez simplement reconnaître l'illusion sans être victime du tour de magie !
- A cet instant même, « je suis et ne suis pas Bouddha » et, l'expérimentant de manière spontanée sans l'affirmer ni l'infirmer... je le suis !
- Si elles ne sont pas différentes, pourquoi la « conscience mentale » comme émanation du mental-ego cherche-t-elle à nous mystifier ?
- Précisément parce qu'elle est elle-même le produit d'une affabulation !
Le ressenti phénoménologique que nous instille la « saisie (innée) du soi », ce sentiment d'intime conviction que l'on affirme la preuve de la réalité de son objet, cette conscience-sujet n'est qu'un simple repli d'un espace ouvert (sans centre ni périphérie, sans bord ni limite) qui s'aveugle de sa propre illusion en se croyant exister par elle-même, et dès lors celle-ci a affreusement... peur de disparaître !
Dissipons tout de suite cette peur infondée et irrationnelle. Le passage d'un état de conscience duelle à un état de conscience non duelle(asubjective et non-référentielle) n'est aucunement synonyme d'une abolition de la conscience ! L'expérience subjective, ce que cela fait de se saisir comme son propre objet, est un « effet de perspective » rendu possible... par l'existence même d'un état non-duel (donc par un lien de causalité), qui est... la nature de l'esprit !
L'esprit n'est pas ce qu'il connaît, pas plus qu'un miroir ce qu'il reflète ! Le miroir ne disparaît pas lorsque rien ne s'y reflète. Les « actes de connaissance momentanés » constitutifs du «continuum de conscience » ne sont pas... la conscience ! En son état naturel, l'esprit connaît au-delà du par-delà du référentiel de la « conscience duelle ». Cette connaissance (ou prajñāpāramitā) transcende l'expérience phénoménologique illusionnée de l'esprit qui se perçoit « sujet » sous la perception de son propre objet épistémique.
La caractéristique la plus importante, partagée par l'ensemble des phénomènes de votre expérience, sans laquelle votre expérience n'existerait pas, qui constitue votre identité véritable, la connaissance de ces phénomènes, la conscience de ceci.
Toutes ces expériences sont connues ! Il y a une connaissance de votre expérience, de cet état, sinon il ne pourrait être expérimenté NEV

- J'ai été témoin de ce qui se passe au moment de la mort...
- « L'intime conviction » qui sourde du témoignage individuel n'est pas la preuve de la réalité de son objet, ni la preuve de l'existence du connaisseur de cet objet, et ne dispense aucunement de questionner la validité de l'expérience.
Il est indéniable qu'il y ait eu connaissance (conscience) sans quoi l'expérience n'eut pas été possible, mais celle-ci n'est pas éliminatoire de la possibilité qu'il ne puisse s'agir... d'une production mentale de l'imaginaire ou du rêve ! Le langage substantialiste la pensée. L'affirmation « j'ai été témoin de ce qui se passe... » postule l'existence d'une réalité ou d'un événement extérieur comme « condition première », causale de leur connaissance, dont l'expérience est rendue possible par l'existence postulée d'une conscience-sujet comme «condition seconde », dans les termes et sous les modalités relatives de leurs ontologies.
Vous n'êtes pas conscient d'être en train de rêver, mais il y a connaissance du rêve. Il n'y a nul besoin d'un connaisseur pour qu'il y ait connaissance, ni d'un expérimentateur pour qu'il y ait expérience, mais la connaissance implique la « capacité de connaître ». Autrement dit, avoir conscience d'être conscient est une simple expérience décohérée de l'existence d'une conscience entitaire. L'on ne peut donc pas non plus écarter la possibilité qu'une « expérience de mort imminente » puisse pareillement être... illusionnée ! « Il est possible de douter du contenu de l'intégralité de votre expérience, car l'ensemble des phénomènes perçus pourrait faire partie d'une illusion. Mais, vous ne pouvez pas douter du fait que "vous" avez une expérience, du fait que "vous" êtes conscient. Sans cette connaissance, rien n'existerait, rien ne serait perçu » NEV.
- Mais, je sais bien ce que j'ai vu ! C'est une chose connue, et il y a de nombreux témoignages de par le monde pour le confirmer !
- Ce qui est irréfutable, c'est la « capacité de connaître », laquelle n'induit pas la véracité de ce qu'elle connaît lorsqu'elle passe par le prisme d'un esprit voilé...
La reconnaissance des divinités du bardo en tant que projections mentales permettra au pratiquant (...) [de] ne pas être entraîné dans le flux des projections mentales en lien avec les émotions, car la personne dépendante dans le bardo sera à nouveau aspirée dans une vie samsarique[1]
Pour relativiser le propos, étant donné que la « conscience de soi » est une construction mentale, il est impropre de parler d'illusion ou d'hallucination pour définir une « expérience de mort imminente », comme d'imagination pour qualifier le rêve, ce qui ne serait pas le cas si l'expérience requérait un connaisseur ! Or, la connaissance est fondée sur la « capacité de connaître », il est donc plus judicieux de dire de toutes les expériences des êtres migrateurs du samsāra, qu'à l'instar de la nature véritable de l'esprit dont l'essence est la vacuité « libre d'assertion », elles ne sont ni réelles ni irréelles, ni vraies ni non vraies...
En instaurant le doute raisonné comme instrument de connaissance scientifique Descartes est voisin du Bouddha, avec lequel il s'entend sur le fait que le monde tel quel nous le percevons n'est pas le monde tel qu'il existe réellement. Le bouddhisme tibétain, en particulier, a fait de l'examen analytique le moyen de développer la sagesse (la « Vision supérieure ») par la démonstration rationnelle de la non-existence du soi de la personne et des phénomènes.
Cependant, chez Descartes, la récusation de la certitude de la connaissance se veut affirmative de la certitude de l'existence du penseur, « je pense donc je suis », ou autrement dit « je suis une chose qui pense », une substance pensante ! Idée au combien réfutée par Nagarjuna (fondateur du Mādhyamaka Prāsangika) dans la lignée de la pensée du Bouddha, et dont la propre démonstration conclut à l'inexistence (no vidyate) !
De plus, Descartes fait découler la certitude de son existence comme être doué de conscience de soi à... l'existence de Dieu ! Pour Descartes, s'il est possible de douter de tout sauf du fait de douter, c'est parce qu'un être suprême et transcendant est la source de cette connaissance ! «Dieu n'aurait pas pu nous créer de telle manière que nous échouons toujours dans la tentative de connaître la vérité[i] ». Ainsi, pour Descartes, le monde physique n'est que l'extension de ce que la connaissance divine nous permet de connaître, « res extensa, c'est-à-dire tout ce qui a une extension, qui peut être observé, mesuré ou pesé » ibid.
Comme le dit maître Thaï, « il y a pensée, mais je doute qu'il y ait un penseur ! ». Ainsi, la conscience de soi, le « cogito ergo sum » de Descartes, ne recouvre-t-elle pas la réalité de l'existence première d'un soi unitaire, substantiel, entitaire et autonome. Il y a seulement un courant de pensée (d'actes de connaissance momentanés) qui, en interdépendance de la perception de son objet s'aperçoit (par un effet de perspective) comme sujet de l'expérience.

Reste que si l'on peut douter de la réalité de l'objet et du sujet, par là-même « la réalité de l'expérience » questionne ?
Le cogito affirme la réalité des « trois
sphères », là où la voie du milieu démontre la vacuité de l'agent, de l'action
et de l'objet. Si nous posons que la perception de l'objet de nos expériences
est relative à l'aperception (laquelle est un « effet de perspective »
du courant/continuum de conscience, émulé sous le caractère de la constance de
soi dans le temps), alors la question se veut affirmative de l'idée qu'il ne
saurait y avoir « d'expérience consciente » hors de cette relativité !
En d'autres termes, le cogito de Descartes affirme « je suis une vague qui ignore qu'il est le mouvement de l'océan »
!
Cette capacité ne serait pas au sens propre celle de « connaître », si parmi (l'ensemble de tout) ce qu'il lui est possible d'avoir connaissance, il n'y avait la capacité... de se connaître elle-même ! Ainsi, la « capacité de connaître » à deux « modes d'expériences » : 1. thétique, c'est « la conscience d'être conscient de soi » sous laquelle la conscience « pose son être comme existant[iv] », comme sujet auteur de l'action, « il y a un agent qui marche » ; 2. non thétique, « il y a la marche, mais pas de possesseur de la marche ». Ce mode non individué (présent y compris en mode thétique puisqu'il est constitutif de « l'expérience de connaître ») est préconscient à (l'émulation de) la conscience qui se saisit sujet, « si la conscience n'est rien qu'elle ne soit conscience d'être, elle n'est cependant jamais, dans sa spontanéité, objet pour elle-même » LCEA.
Sarthe voit dans ce mode ante subjectif un « cogito préréflexif », « conscience de soi » avant d'être « conscient de soi », « conscience spontanée (...) conscience d'elle-même de manière non objectivante » LCEA. Conditionnelle de l'émulation/ objectivation d'une conscience subjective sans l'être elle-même, elle porte en elle une « intention non intentionnelle », comme l'archer zen qui bande son arc et tire sans viser le centre de la cible. Hors de la dualité sujet-objet, l'on ne peut en effet parler d'intentionnalité, laquelle est relative à l'agent qui effectue l'action. «Sartre sépare le "Je" de la pensée qui se pense. La "proximité absolue de la conscience par rapport à elle-même" précède la reprise réflexive de soi qui engendre le Moi et traverse toute intentionnalité objectivante » LCEA.
Abandonne le cheval instable de la pensée qui modifie sa course comme le vent. Réalise ta propre nature Spontanée et la pensée d'un coup, s'immobilisera ! LGSE
La « capacité de connaître » non thétique est spontanée : présence (ou état de présence), sans centre ni bord, sans étendue (ni absence relative d'étendue), sans limite ; connaissance non duelle (asubjective, non thétique, en-deçà de la dualité sujet-objet, du connaisseur-connaissant-connu, des « trois sphères » de l'agent, de ses actes et de son objet) ; connaissance non séquentielle, sans début, milieu, fin, durée (ni absence conventionnelle de durée) ; connaissance non référentielle (non identitaire, non représentationnelle, non conceptuelle).
Ces trois dernières définitions en font une « connaissance transcendante » qui dépasse tout objet et toute objectivation sans être de nature transcendantale, car elle partage l'essence de toutes choses. « Transphénoménale » comme la dit Sarthe « condition d'apparition de tout phénomène » LCEA, de toutes apparences relatives, en étant elle-même un effet de perspective de par la vacuité de son essence. Le bouddhisme la définit comme « l'esprit de Claire Lumière.
Sous l'acception courante, l'esprit est un principe inhérent qui déploie sous une forme instanciée, de manière individualisée, autonome et identitaire, les qualités immanentes à l'intelligence et au savoir, causales des facultés de concevoir et de raisonner. Pour la philosophie bouddhiste tibétaine, l'esprit - ou la conscience, termes mutuellement inclusifs - est simplement « l'évidence du connaître », claire et lumineuse, directe et spontanée, sans distanciation, sans interprétation (ni interprète) entre expérience et connaissance. Il n'y a pas d'agent qui a conscience de marcher, mais la simple évidence de la connaissance de la marche qui est l'action même de la marche sans connaisseur de celle-ci.
Tu peux contempler un lotus et n'y voir que fleurs, cœur, feuilles et tiges. Abandonne ces distinctions futiles, vois le lotus LGSE

« Évidence » ou « capacité », la conscience n'est pas synonyme de détenteur de la science infuse. Elle n'est pas synonyme de « savoir absolu », connaissance innée de toutes choses y compris de sa véritable nature, sans quoi nous ne serions pas dans l'ignorance et nous serions libres depuis toujours !
- Mais, comment l'esprit peut-il être l'évidence de connaître qui ne soit pas en même temps... l'évidence de sa propre connaissance (de sa nature véritable) ?
Le terme n'est pas à traduire par « preuve ». « L'évidence du connaître » (et non pas de connaître, lequel serait propre à une conscience-sujet) n'est pas déterminante de la véracité de cela qui est connu. Nous avons chacun une expérience différente du monde. Tous les êtres sensibles (dotés d'un esprit au sens bouddhiste) font l'expérience « du connaître par évidence » relative à leurs capacités de cognition (à leur état mental, émotionnel, psychologique, à leur histoire personnelle, à leur karman) qui sont autant de voiles dont les prismes biaisent et déforment la conscience-connaissance spontanée.
La conscience est la « capacité du connaître », mais son aperception n'est possible qu'à la condition pour le spontané de se « viser expressément », dans un retour intentionnel par «distanciation » à l'expérience. « L'intuition de la chose implique une conscience (de) soi tandis que la conscience prend conscience de soi en tant qu'elle est conscience d'un objet transcendant » LCEA.
De cette fragmentation, tel l'océan en vagues, « l'intention opératoire qui ne pose pas d'objet » LCEA émerge en « intentionnalité thétique ». Le spontané se mue alors en réflexif, d'interjectif se fait nominal, s'illusionne par ignorance de se croire entitaire, doué de libre-arbitre et s'enorgueillit de « ses » propres expériences. Sous la dualité, le « connaître par évidence » s'exerce alors sous l'emprise d'une autosaisie qui s'affirme « Je ». Auparavant libre de penseur, la pensée se commue en expérience du penseur ! « Je pense donc Je suis ».
« Je pense ceci, je pense cela... »
La perle de l'action comble tous les désirs.
Étrange que ceux qui se livrent à la connaissance intellectuelle aille à leur perte alors que la grande félicité réside en leur propre cœur LGSE
- Si la conscience est « évidence », comment peut-elle fluctuer d'un mode à l'autre ou comment l'évidence d'une évidence est-elle autre chose qu'évidence ?
- En effet, si connaître cette évidence est « conscience de soi », elle doit l'être depuis toujours sans requérir un « état préréflexif » ! De fait, la distanciation de la « conscience spontanée » à sa propre perception ne saurait être conditionnelle de l'émulation d'une instance « consciente de soi », car cela induirait alors qu'elle fût un objet (donc duelle en sa nature) avant même de saisir comme tel !
- La question n'est peut-être pas tant d'aligner les deux définitions que d'interroger la manière dont un « effet de distanciation » peut se produire étant donné que dans sa dimension absolue « l'évidence du connaître » est non seulement non duelle et non référentielle, mais aussi non locale et atemporelle ?
- La réponse est dans la question ! Les deux définitions recoupent des niveaux différents d'une même réalité, relative s'agissant de la « capacité de connaître », ultime (ou de « dimension absolue ») s'agissant de « l'évidence du connaître ».
A l'instar du vide-forme versus la forme-vide, de la conscience non thétique vs la conscience thétique, de l'intention non intentionnelle de la conscience spontanée vs l'intentionnalité de la conscience-sujet, qui ne sont pas deux en nature mais en aspects ou en modalités (comme la vacuité qui apparaît comme la cause et l'effet), la dualité est la non-dualité ne sont pas des contraires irréductibles, des opposés irréconciliables, la première à l'origine de toutes nos souffrances, la seconde rendant possible notre libération...
Tel le flux et le reflux incessant de l'océan, la dualité et la non-dualité dessinent un ballet constant et impermanent lequel est la condition même qui rend possible « l'expérience consciente » sous la coémergence des apparences à l'esprit ! Une seule chose (connaître) est l'essence de tous les modes de conscience (« évidence » et « capacité »), et leurs déploiements/ampliations (dans la « dimension absolue » et la sphère du relatif) l'essence du connaître.
Ainsi, la « distanciation » de la conscience à l'expérience n'est pas le moteur d'une instanciation de la conscience spontanée en sujet(qui serait un processus de transmutation de l'évidence en capacité), c'est le simple « jeu de perspectives » de l'ultime et du conventionnel au sein (de l'universalité indivise)du connaître. La « connaissance » est donc à la fois transcendantale (Prajñāpāramitā) sous la perspective de l'essence (asubjective, non duelle et non-référentielle) et instanciée sous la perspective du relatif.
Quel est le mirage ?
Les mondes, les organes des sens et leur objet changeant.
Je ne dissimule rien.
Retourne à cette immense profondeur où il n'y a plus ni soi-même ni autrui, cette expérience intime, jouis-en dans la suprême félicité du Spontané ! LGSE

Ultimement, il n'y a ni marcheur ni action de marcher existant et... n'existant pas réellement, et relativement l'action de marcher contient le « marcheur ». Elles ne sont pas éliminatoires, mais indissociables, car leur forme ne pourrait autrement fluer et refluer (en perspective) l'une de l'autre. Lorsque la conscience en vient à s'oublier en tant que sujet qui fait l'action pour laisser place à un flux intentionnel dépourvu d'intentionnalité, il ne s'agit aucunement là de la dissolution d'une substance (ni d'un « changement d'état »), mais d'un simple « effet de perspective » (sans discontinuité et sans obstruction) de l'être au phénomène. « La conscience s'explicite sur fond d'être. L'être pour-soi [la conscience spontanée] désigne la dimension purement immanente de la conscience "complète", intentionnelle. Cette structure ontologique, non intentionnelle, permet la visée de quelque chose en se faisant rapport à l'être, en deçà de toute visée objectivante puisque l'être n'est pas un phénomène » LCEA.
Le terme « phénoménal » ne désigne pas l'action, et « l'être » ne désigne pas l'agent qui effectue (intentionnellement) l'action, mais respectivement : le mode instancié (la capacité de connaître individualisée de la conscience-sujet) ; versus le mode spontané (« l'évidence du connaître »). L'aperception de soi n'est pas un « existant premier », c'est l'ontologie vide de substance du connaître. Ainsi, « l'évidence du connaître » n'est pas l'évidence d'une évidence, c'est l'évidence d'être ! « Toute la qualification concrète de la conscience vient de ce dont elle est conscience. Ni autonome, ni substance, elle n'est pas un être séparé, rien qui puisse s'unir à quoi que ce soit, mais uniquement, d'un point de vue ontologique, l'être par lequel il y a de l'apparaissant » LCEA.
Saraha chante :
toi qui t'égards, connais le Soi qui ne peut être l'objet d'aucune méditation, d'aucun mantra, d'aucune concentration LGSE
La personne ne saurait alors être considérée comme une construction dont la pierre angulaire serait la « conscience spontanée » (non thétique), sur laquelle se consoliderait l'édification de la structure d'un « moi identitaire » (psychologique), comme les murs et le toit d'une maison sur ses fondations et sa charpente.Point de « flèche de la connaissance » qui, à l'instar de celle du temps, inscrirait l'être dans le processus de la phénoménalité. « La phénoménalisation se fait sur fond d'être sans que cet être puisse de lui-même en être source » LCEA.
L'ignorance au sens bouddhiste - la chute de l'âme dans la matérialité au sens chrétien ou la séparation du soi individuel au soi universel, l'atman au brahman, dans les traditions védiques - n'est donc pas constitutive d'un schisme de la conscience. La libération du nirvāṇa et de l'Éveil ne constituent pas un « retour » du connaître à son mode d'expérience naturel, libre et spontané, tel le reflux des vagues sur la plage, c.à.d. dans l'océan d'une « conscience universelle ». Même si toutes choses ont la même essence, puisque « libre d'assertion » celle-ci ne peut être posée comme unitaire, nouménale et immanente -.
Poser l'existence du « sujet » comme préalable à l'émergence de l'émotion relève en fait du constructivisme. Puisque qu'un penseur n'est pas nécessaire pour qu'il y ait pensée, il peut donc également y avoir émotion sans un agent pour la produire. Cela ne veut pas dire que l'émotion naisse sans cause, non ! Seulement qu'il n'est pas nécessaire de postuler l'existence d'une conscience qui se saisit sujet comme conditionnelle des émotions.
Le comportement humain n'est d'ailleurs pas guidé par la raison, laquelle sert en réalité de justification à ses émotions, un phénomène qui va de pair avec la diminution de « l'esprit critique» - la possibilité de tout débat objectif impliquant d'être abstrait de toute charge émotionnelle -. La capacité à se questionner posément est inversement proportionnelle à la frénésie et aux antagonismes qui enflent dans les esprits, comme actuellement partout dans le monde...
S'agissant de cette vue linéaire et dualiste, elle conçoit le rapport du déploiement entre le mode « spontané » et le mode « intentionnel » de la conscience comme structurel d'une individualité qui s'articulerait sur une « chaîne de coproduction conditionnée » (conscience, sujet, émotion), laquelle s'exprimait sous la forme d'un agent autodéterminé possesseur de l'action. Une lecture non dualiste serait de considérer le « changement de perspective » entre ces modes comme étant modulé par l'émotion... sans l'entremise d'un agent ! L'émotion induit, renforce et exaspère une réponse subjective (laquelle revêt la forme d'une conscience-sujet) qui dissout la « spontanéité du connaître », laquelle émerge à nouveau et se redéploye (comme non dualité) à proportion de la diminution émotionnelle, tel le flux et le reflux des vagues sur une plage.
Lorsque toute émergence est libre,
Les choses sont l'éveil même.
Pour purifier le cœur/esprit
Encore faudrait-il le trouver.
A travers le temps et l'espace, pas d'éveil.
C'est la grande profondeur.
La connaissance est inconnaissance
Et l'inconnaissance saisit l'essentiel LGSE-126

« La capacité de connaître » est toujours là, présence spontanée et directe, sous le mode subjectif et intentionnel, car « l'évidence d'être » est la condition même de l'expérience et de toute expérimentation ! « L'être n'est pas derrière le phénomène, il en est l'une des conditions de révélation » LCEA. La perspective de la « conscience intentionnelle » subordonne toute expérience à une conscience-sujet. Identifié au « je », l'idée de sa dissolution instille l'angoisse de disparaître. « Aucune extrême angoisse ne peut se comparer à l'excès de désespoir qui le submergea à la pensée d'avoir perdu son identité (...) être conscient de son existence et savoir que l'on n'est plus un être défini distinct - que l'on n'a plus un soi - voilà le sommet indicible de l'épouvante et de l'agonie » DM-205.
- Ce à quoi, il convient de rétorquer : être conscient d'exister sans obstruction, savoir que l'on n'est pas un être fragmenté et isolé (qu'il n'y a pas de soi réel et autonome) est le sommet sublime de la paix et de la félicité !
- Mais, hors d'une conscience qui se saisit sujet, point d'expérience sensible ! L'on ne peut avoir l'une sans l'autre. Vouloir atteindre, à tous prix, « l'au-delà de toute peine » (le nirvāṇa), c.à.d. en en faisant la visée exclusive de la « précieuse vie humaine », n'est-ce pas se couper de la réalité du monde qui est expérience, ce qui semble pour le moins une approche mentale si ce n'est... extrême ?
- Gravir la montagne sans profiter du paysage, se rendre directement au sommet sans parcourir le chemin, marcher sans goûter au bonheur de l'instant, cheminer dans la souffrance, tout cela n'est pas très cohérent, pas plus que... de s'engloutir dans le plaisir pour se libérer ! Pour autant, s'abstraire du marcheur en se laissant couler dans le flux de la marche n'est pas extinctif de l'expérience !
Si on est intégralement dans quelque chose, dans la présence, le souffle, le silence mental, on va expérimenter la totalité et la frustration disparaît totalement.
Ce qui veut dire que l'on a le droit de toucher complètement la vie, en touchant n'importe quel objet de la vie, n'importe quel détail, ne serait-ce que les détails les plus infimes, ça va nous ouvrir à les portes à la totalité MIR
« Une expérience sans sujet » n'est pas une incompatibilité de principe. La conscience est tissée du connaître. Le marcheur est contenu dans l'action de marcher et la marche est inscrite dans le marcheur. Ce n'est pas une question de nature, mais de présence ! Lorsqu'il y a « conscience du connaître », c.à.d. lorsque l'agent s'établit en « pleine conscience » dans l'action, c'est comme s'il disparaissait pour laisser place à un « agir pur », non duel. Inversement, lorsqu'il y a «conscience de connaître » sous la perspective de l'intentionnalité, alors l'action apparaît comme objet de l'agent. Pour autant, si le flow et (l'illusion du) sujet semblent s'occulter sous des expériences divergentes du connaître, le sensoriel ne disparaît pas, il est simplement expérimenté autrement...
Le « lopin du ménétrier » est un endroit idyllique, un coin de nature champêtre, arboré et fleuri où règne la paix et le calme. C'est aussi... un personnage au sens où les mythologies personnifiaient les forces de la nature ! Il apparaît tantôt sous une forme anthropomorphe, tantôt sous la forme de la nature, sans pouvoir dire lequel (le lieu ou la personne) est la nature de l'autre... A l'instar de la conscience, ils partagent le fait d'être connu sans quoi leur expérience ne serait pas possible !
En latin, natura désigne « le cours des choses[iv] », c.à.d. le fleuve incessant et impermanent qui est à la fois une « puissance vitaliste immanente » et le vivant qu'elle engendre sous toutes ses formes dont elle n'est séparée. « Si vous arrivez à ressentir vraiment [que vous êtes le vent le soleil, la lune], il y a un processus d'union qui s'établit. C'est ça un état extatique, sortir de cette idée que l'on est un être séparé. On devient un être intimement vivant, frémissant. Finalement, tout ce qui est autour de nous est une porte vers l'infini » MIR.
Saraha chante :
ne médite pas, n'abandonne pas le monde, vis en compagnie.
Si tu n'es pas délivré en prenant un profond plaisir au monde sensoriel, peut-on dire que la connaissance est parfaite ? LGSE

Dans les déclinaisons poétiques de William Blake, « voir l'univers dans un grain de sable, tenir l'infini dans la paume de la main où l'éternité dans une heure », sourde l'intuition que depuis «des débuts sans commencement » chaque chose participe à l'existence de « la pointe de l'instant présent » ! De fait, « en touchant n'importe quel objet de la vie, n'importe quel détail, ne serait-ce que les détails les plus infimes, ça va nous ouvrir à les portes à la totalité » MIR.
- Il s'agit là d'un simple « effet de perspective ». Dans un miroir, le reflet d'une porte... n'est pas une porte ! Dans la « dimension absolue », sans discontinuité ni obstruction, il n'y a pas de porte car tout est ouvert sur tout sans que l'on puisse le désigner comme « unité » ou «totalité » - termes tendancieux, car ils substantifient l'être des choses (la vacuité) dont l'ontologie a précisément pour caractère d'être « libre d'assertion », autrement dit libre de toute ontologie ! -.
Ainsi, connaître se présente spontanément comme « évidence » et se dévoile intentionnellement comme « capacité ». Or, même l'ignorance de ce « jeu de perspective » n'est pas invariable ! Si l'extase est l'expérience de la félicité, ce n'est pas parce qu'elle est la «sortie de » l'illusion dualiste, mais la reconnaissance que toute chose est à la fois existante... et non existante !
Comprendre la vacuité amène à sa réalisation, mais elle n'est pas une transition radicale entre conceptuel et non conceptuel. La reconnaissance de la vacuité n'est pas un « saut quantique»- passage imprévisible, sans transition d'un état à un autre -, c'est « l'intuition de l'être » (des apparences à l'esprit, de la carte au territoire) révélatrice que la pensée logique et les phénomènes qu'elle se veut expliquer (les mots et le sens) ont la même essence « libre d'assertion » !
Sahara chante :
il n'y a rien à affirmer, à nier ou à saisir, car la réalité ne peut être conceptualisée.
Les êtres trompés sont à jamais enchaînés par les fragmentations de l'intellect.
La nature innée demeure libre et non divisée YT
Parce que l'essence de la conscience est la vacuité d'existence inhérente et autonome, connaître est « libre d'assertion » sous toutes les perspectives, spontanée versus intentionnelle, duelle vs non duelle, locale et temporelle vs non-locale et atemporelle ! Et puisque tout ce qui est par essence « libre d'assertion » est sans incompatibilité puisque sans contraire, et que les modes du connaître sont des états relatifs, alors « l'évidence d'être » est spontanée et intentionnelle comme toute expérience est sensible et vide !
La saisie de la vacuité d'existence véritable des choses se révèle à mesure que l'on médite, les yeux ouverts, en s'entraînant mentalement à voir toutes choses « vides » (sans discontinuité d'essence), transparentes comme un cristal, pures comme l'espace incomposé, claires et lumineuses comme l'aube qui se lève dans un ciel sans nuage... Bien qu'ils soient de l'ordre du conceptuel, les mots (la pensée logique) nous aident paradoxalement à développer cette «non vue », qui ne peut s'appréhender que sous le mode du connaître spontané. Un paradoxe qui n'en est pas un, car le relatif est sans obstruction à l'ultime...
Le maître te dira qu'à l'extrémité spatiale de l'organe sensoriel, l'ego se dissémine et que se manifeste alors le corps du Spontané LGSE

La chose est vide et le mot qui la désigne en est l'extension. Telles qu'elles nous apparaissent comme monde, toute chose est vide de substance intrinsèque et véritable. Il n'y a donc pas de « territoire » là-dehors constitutif d'une réalité propre (un espace-temps formant un univers autonome). Voyez toutes choses comme des hologrammes... Tout est là, devant, tout autour, déployé dans toutes les directions, étendu dans l'espace, et pourtant... tout ce que vous pouvez voir, tout ce que vous pouvez toucher, sentir, goûter est tel un simple reflet dépourvu d'essence, transparent, impalpable, intangible... Ce que nous désignons sous le nom de « concret » n'est rien d'autre que cela, présence nue, forme-vide !
Sous cet angle, vos pensées vous apparaissent toujours exister de leur propre côté comme un existant propre et autonome. A ce stade, vous croyez encore que vous pouvez dessiner une carte de ce « territoire fantôme » en le couvrant de vos mots, jetés tel un filet, pour en saisir l'être, mais vous ne ramenez... que le filet ! A cette étape, ce sont maintenant vos pensées qu'il vous faut voir comme des hologrammes ! Pas seulement vos pensées, tout ce qui apparaît dans votre conscience mentale que l'on désigne sous le terme « phénoménologie » (images et sons, imagination, imagerie onirique, etc.). Car l'essence de votre esprit est la vacuité d'existence inhérente et indépendante, et c'est la même essence que les choses qui vous apparaissent comme extérieures ! Une seule chose est l'essence de toutes choses et toutes l'essence d'une seule. Autrement dit, tout ce qui apparaît là-dedans (dans votre « sphère mentale ») et tout ce qui apparaît là-dehors (le « monde physique ») ont la même essence, et sont ultimement sans discontinuité. Les apparences et l'esprit sont coémergents.
L'espace perçu comme contenant (volume délimité par les lieux et les objets), l'espace vu comme forme (dimensions, couleurs, etc.), l'espace imaginé comme étant contenu à l'intérieur de ces formes, tout est vide d'essence ! Voyez le reflet dans le miroir... Il a le même aspect que cela qui s'y reflète et que vous percevez sous le même abord, c.à.d. comme des objets distincts, le reflet de votre propre corps, revêtu du reflet de vos vêtements, entouré du reflet des reflets des objets qui occupent la pièce, contenus dans le reflet du volume de la pièce délimitée par les murs, le sol et le plafond... Vous voyez la réflexion de la lumière dans le miroir comme si elle était composée d'une multitude de reflets séparés, intrinsèques et autonomes, mais il n'y a qu'un seul reflet, global, où tout est là, sans distinction, sans transition ni séparation ! Le monde qui vous entoure n'est pas différent. Tout ce qui apparaît ne relève pas d'une réalité extérieure...
Puisque sans essence, les apparences sont sans obstruction ! Il n'y a pas de différence ultime entre une chaise, une table, un mur, une fenêtre, une plante, un animal, un caillou, votre corps, l'espace... Tout cela n'est pas le reflet d'une réalité ontologique, mais de l'esprit ! Le monde est l'aspect sous lequel vous apparaît l'être de la conscience (non pas votre conscience individuelle, mais le « connaître » qui est sa nature). La forme, les caractéristiques, les limites et les modalités sous lesquelles nous faisons l'expérience de la « matérialité » (sur la base du postulat d'une nature propre à la matière distincte de celle de l'esprit), tout cela est en réalité l'expression de la « capacité de connaître » qui n'est autre que conscience et présence ! Ce que nous désignons sous le nom de « monde » n'est rien d'autre que cela, la simple « évidence du connaître » !
Dans la conscience, il n'y a pas de dualité, pas de séparation. C'est comme un cosmos dans lequel tout flotte. On perçoit que l'on n'est pas seulement ce qu'on croyait être, mais que l'on est la totalité.
C'est cela l'illumination, c'est l'expérience que l'on est la totalité, que tout ce qui est perçu, touché, regardé, fait partie de nous. Un mystique c'est quelqu'un qui a cette sensation d'unité, et qui dans le particulier voit la totalité MIR

Il n'y a donc rien de surprenant, de paradoxal ou de contradictoire, à ce que le verbe (qui est à dépasser pour reconnaître la vacuité), puisse être le vecteur de l'intuition de la véritable nature de l'ontologie de l'être des choses - une ontologie par ailleurs « vide d'ontologie » puisse la vacuité est libre d'assertion ! -, comme l'art, la nature, la vie, constituent peuvent également des canaux propices au sentiment esthétique, puisqu'ils en partagent l'essence ! «Servez-vous de toute la beauté que l'on trouve dans la nature pour by passer l'ego. Le yoga, c'est aussi cette capacité d'émerveillement qu'on peut avoir et qui va tous les jours nous guider vers l'infini à travers quelque chose de fini. Comme cela, on évite la distinction d'absolu et du relatif, du pur et de l'impur, du profond et du superficiel, toutes ces distinctions proviennent du mental » IBID.
Lorsque l'on perçoit toutes choses sans discontinuité ni obstruction, distinguer l'extérieur de l'intérieur, les mots des choses, la carte du territoire, opposer le pur et l'impur, la nature de l'artificiel, le vertueux et le non vertueux, les émotions perturbatrices et leurs antidotes, ne fait tout simplement plus sens puisque tout est de la même essence, ultimement ni réel ni irréel, ni vrai ni non vrai, ni existant ni non existant ! Sans contraire, il n'y a plus de « principe d'incompatibilité » !
Lorsque vous saisissez toutes choses sans obstruction, rien ne disparaît ! Tout se révèle simple effet de perspective ! Ce que vous voyez là-dehors revêt toujours l'aspect et les caractéristiques d'un monde composé, les pensées qui surgissent et disparaissent dans votre «champ de conscience », présentent toujours un caractère impalpable, mais tout est présent à la fois, contiguë, sans transition... séparables (en apparence) mais non séparées dans l'être...
Toutes les apparences sont une vaste ouverture extatique et totalement libre (...) Quand on regarde vers son propre esprit, la racine de tous les phénomènes, il n'y a rien d'autre que la vacuité, rien de concret à considérer comme réel (...) Dans l'étendue absolue de la conscience, toutes les choses sont mélangées dans ce goût unique, mais d'un point de vue relatif, chaque phénomène est distinctement et clairement vu.
Shabkar, un chant de joie[1]
A l'instar des « expériences de mort
imminente » d'aucuns affirment avoir fait l'expérience de
«sortir de leur corps ». Ce sentiment de
« délocalisation » n'est pas à confondre avec la non-dualité, c.à.d.
lorsque les choses ne se différencient plus en essence tout en restant perceptibles
(ce qui serait autrement nihiliste). Il s'inscrit dans la perspective
substantialiste et, par effet miroir, met en relief le caractère artificiel du
« sentiment de localisation » dont il questionne l'origine.
La question à poser n'est pas de savoir comment l'esprit peut « sortir » du corps (et par extension comment il y est « entré »), mais comment se construit l'illusion de la dualité ?
Ce qui peut être perçu étant ce qui peut être conçu, la perception que nous instille « la vue de l'ensemble périssable » (nos agrégats), et l'intime conviction de la croyance que ce « corps » qui existe indépendamment n'est pas l'esprit qui le peuple temporairement, proviennent de la même ignorance qui fait apparaître comme « monde » les aspects de l'être du connaître !
Marchez rapidement, en pleine conscience, en vous concentrant à la fois sur le mouvement et sur l'espace. Voyez-les sans obstruction, jusqu'à ce qu'ils se fondent l'un dans l'autre, jusqu'à ne plus les distinguer... Il se produit alors un effet de déréalisation du temps similaire à la «disparition de la localité » ! Lorsque la conscience du corps, la conscience du mouvement, la conscience de l'espace qui entoure le corps (jusqu'à l'espace mentalement visualisé entre les atomes du corps) ne se distinguent plus, alors... la séquentialité disparaît également !
Sans obstruction entre l'espace immobile et le corps en mouvement, il n'y a plus de distance entre le miroir et le reflet... Lorsque cela se produit (progressivement et furtivement au début), à ce moment-là (inqualifiable en termes de temporalité et de durée) vous ne savez plus si vous êtes en train de marcher... ou si vous êtes l'espace au sein duquel se produit le mouvement de la marche ! Tout semble irréel, sans substance ni forme, comme un reflet sans miroir...
Abandonne la dualité, réside dans l'unité.
Que ta connaissance soit libre de distinctions.
Que le frémissement de ton amour ne perçoive dans la totalité des mondes que la couleur de l'Un !
Alors, rien n'a plus de naissance, d'évolution ou de fin.
Le devenir s'épuise.
Le nirvāṇa disparaît.
Dans la Béatitude suprême, plus de différence entre toi et le monde ! LGSE-57

- Quels points communs y a-t-il entre la vue d'un bus rouge qui passe dans la rue devant vous, l'image mentale d'un bus rouge qui
apparaît sous une forme idéelle visualisée dans votre conscience mentale, et rêver d'un bus rouge ?
- Chacun semble exister de son propre côté sous des modalités qui reflètent les caractéristiques du monde auquel il appartient et dont il partage la nature propre (physique, mentale, onirique). Mais en réalité, tous ont la même essence, la vacuité d'existence substantielle et indépendante, et tous également possèdent la même nature, celle de l'esprit dont ils sont l'expression. Ils sont donc sans discontinuité du point de vue ultime, et sans obstruction du point de vue relatif !
- Vous pensez possible de « voyager » entre les mondes ?
- Selon la physique, l'univers est structuré par des valeurs universelles, les « constantes fondamentales[vi] », dont l'ajustement très précis à son origine est déterminant de ses propriétés, formes et caractéristiques. Si elles avaient été ne fût-ce que très légèrement différentes, la vie (intelligente) telle que nous la connaissons n'existerait pas ! Et même s'il existait autant «d'univers multiples » que de combinaisons possibles de ces constantes, il serait peu probable de pouvoir se rendre d'un monde « matériel » dans un monde « non matériel », encore moins dans le « monde des rêves » intangible et incommunicable...
- Pourtant, dans le bouddhisme, l'on dit que « l'être du bardo » doit mourir afin de pouvoir renaître dans le « bardo de l'état intermédiaire » de sa vie suivante ?
- « Transmigrer, c'est être dans l'illusion de la séparation » LGSE. Considérez la question en termes d'information... Étant dépourvue de propriétés physiques, l'information s'abstrait de tout ordre et de tout mode de manifestation !
A l'aide du « doute critique » commencez par accepter de ne pas prendre les choses (et les enseignements) au pied de la lettre... Sous l'éclairage de la sagesse qui saisit la vacuité, réfléchissez et méditez sur le fait que toute chose est le reflet de la conscience. La notion de monde ne recouvre pas une réalité physique, inhérente et autonome, mais désigne un « acte de connaissance » qui prend la forme d'un aspect du connaître modal. Ce qui rend possible son « expérience partagée », ce sont les capacités de cognition de l'esprit, déterminantes des modalités sous lesquelles celle-ci est expérimentée tout en elles-mêmes déterminées par ses voiles (l'ignorance et le karman).
Autrement dit, ce ne sont pas des conditions extérieures propres à « l'en soi » d'une « réalité première » qui modèlent la causalité sous l'égide de laquelle nous en faisons l'expérience et façonnent la forme de notre ressenti à son contact. La « matérialité » qui caractérise le monde dans lequel nous vivons à l'état de vigilance éveillée, l'oniricité qui définit celle de « l'univers du rêve » dans lequel nous évoluons au sein du sommeil paradoxal, ne sont que de simples reflets du connaître, lesquels sont des états/formes de la conscience !
Les esprits qui possèdent une capacité de « représentation » similaire, à un degré voisin, feront ainsi le même type d'expériences. Ce que le bouddhisme traduit par (la déclinaison du connaître en) six « catégories d'êtres du samsāra ». Ce que chacun expérimente est le reflet des voiles karmiques qui recouvrent son esprit, dont la force de l'imprégnation (en premier lieu, l'ignorance), l'empêche de voir que les apparences sont coémergentes à l'esprit. Nous ne vivons pas dans le même monde, nous faisons une même expérience du connaître !
Des humains qui vivraient toute leur vie dans une cuve, branchés sur un système de contrôle et évoluant mentalement dans une simulation informatique réaliste, auraient l'impression de faire l'expérience d'un « monde réel » sans jamais avoir aucun contact physique direct entre eux ni avec ce monde fictif !
- Vous vouliez dire que nous vivons en réalité dans une matrice ?
- L'idée d'une « matrice » est encore trop dualiste en ce qu'elle postule l'existence d'une conscience identitaire. Les « apparences sont l'esprit » signifie que toutes les choses qui apparaissent « là-dehors comme monde » et « là-dedans comme pensée » sont sans obstruction entre elles, car de la nature de l'esprit. « Tout est conscience » et tout relève de « l'expérience du connaître » laquelle est l'évidence spontanée, non intentionnelle (non duelle et non-référentielle), qui est l'intuition de « l'ontologique de l'être », vacuité « libre d'assertion ».
Et cela induit que la conscience ne revêt pas seulement cette forme d'expression qui nous apparaît « comme monde »(physique, rêvé, etc.), dont nous faisons l'expérience sous les modalités relatives du bardo de leur « état de conscience » commun, mais qu'elle recouvre également l'avatar du mode de « conscience intentionnelle » que nous éprouvons « comme sentiment entitaire et identitaire » ! Autrement dit, la conscience de soi est l'autre aspect du connaître !
Shakespeare disait que « nous sommes faits de la même étoffe que nos rêves », sous-entendu que le rêveur n'est pas le producteur/possesseur du rêve, mais une partie du rêve qui se perçoit comme tel ! Ce qui nous apparaît duel (le penseur et la pensée, le marcheur et la montagne, le décor et l'acteur, etc.) ne sont que de simples apparences revêtues par la conscience, comme les vagues par l'océan...
Ce qui émerge de la conscience est d'une nature identique à celui qui est conscient.
Les vagues diffèrent-elles de l'eau ?
La nature égale du devenir est celle de l'espace même LGSE

- Ce n'est donc pas seulement le monde qui est halluciné, mais aussi le sujet ?
- L'essence de toutes choses est « libre d'assertion », il n'existe donc ni absolu, ni modèle, ni norme de référence. L'on ne peut pas ainsi affirmer (ni infirmer) que les NDE soient hallucinées puisque toute expérience n'est qu'apparence ! Ne nous y trompons pas. User du doute crique quant à la véracité des « expériences de mort imminente » ne vise pas à les réfuter (parce qu'elles n'apparaîtraient pas crédibles à qui ne les a pas vécues), mais s'inscrit dans le questionnement plus vaste de ce que nous considérons comme la réalité. « La diversité du cycle de la vie et de la mort n'est qu'une forme de conscience » LGSE.
- Au-delà de la « saisie du soi », chaque esprit n'en est pas moins unique ?
- Peut-on diviser en parties ce qui en essence est « libre d'assertion » ?
- N'est-ce pas là la particularité de la « vérité conventionnelle » ?
- Ce qui apparaît séparé est en réalité indissociable. La différence entre relatif et ultime n'est qu'un « effet de perspective » de l'esprit voilé ! La « production interdépendante » ne désigne pas la causalité inhérente au monde tel qu'il (nous) apparaît, mais les conditions sous l'égide respective desquelles se déclinent (pour chaque catégorie d'être sensible du samsāra) «l'expérience du connaître » qui (nous) apparaît comme monde. Autrement dit, le monde n'est que conscience et le sujet conscient est lui-même un monde !
Nous croyons ce que notre perception nous donne à voir, à ressentir, à éprouver, sans questionner sa véracité. De l'impression de la stabilité de la « conscience de soi » dans le temps, nous inférons la preuve du caractère immanent de la conscience sans opposer le moindre argument à sa possible facticité...
Tant que l'esprit demeure sous l'emprise de l'ignorance, c.à.d. que nous n'avons pas reconnu la vacuité de son essence et la coémergence des apparences à la conscience, son « mode de perspective », c.à.d. son expérimentation, ne cesse d'osciller entre spontané et intentionnel, entre non-dualité et dualité, ne serait-ce que durant de brefs et non mesurables instants, comme dans le bardo du rêve...
- Que faites-vous du « rêve lucide », du fait d'exercer le contrôle sur nos rêves ?
- Nous savons déjà que nous rêvons, autrement nous ne pourrions pas en faire l'expérience comme rêveur ! Vouloir contrôler les rêves, revient à affirmer l'existence d'un producteur/possesseur du flux des pensées ! Sous l'emprise de la dualité, la perception est duelle sinon la conscience ne percevrait pas les choses comme « objets » en opposition à son aperception comme « sujet ».
Là encore, il ne s'agit pas de dénigrer le « rêve lucide », mais de questionner l'expérience. Tant qu'il n'y a pas reconnaissance de la vacuité, les « états de conscience » que sont les bardos apparaissent comme monde ! Sous la dualité, le spontané se fait intentionnel, la conscience s'instancie sujet, le rêve se rêve rêveur ! Sous la dualité, les contraires se font incompatibles...
Par-delà toutes les explications psychologiques, rêver de « courir au ralenti » traduit une «dissonance cognitive » entre : la vue sans obstruction du corps et de l'espace qui amène à la dissolution du « sentiment de localité », couplée à la dissolution de la mesure de l'écoulement du temps ; versus l'obstruction instillée par « l'empreinte mentale » d'une conscience fragmentée par l'illusion de la localité - laquelle est induite par la vue des agrégats « l'ensemble périssable » - sous une « figure d'interférence » dont l'expérience est désignée comme rêve.
Comme votre niveau de conscience individuelle va fondre complètement quand elle perçoit la "conscience cosmique", il n'y a plus de consciences, il y a une conscience (...)
C'est une sensation très naturelle. Si vous avez vraiment compris ça, la voie devient beaucoup plus accessible. Ce n'est plus cette succession de mystères qui devraient vous conduire à l'infini MIR

Lorsque se produit le glissement de la dualité à la non-dualité, où les apparences se révèlent coémergentes à l'esprit (sans discontinuité et sans obstruction), que l'expérience est saisie sans fragmentation du connaître (pensée sans penseur), et que plus rien n'apparaît incompatible car sans contraire (pur versus impur), la « vue amodale » qui se forme apparaît paradoxalement sous un abord... modal !
C'est comme si le passage du mode intentionnel/spontané de la conscience, qui suit la transition de « l'ici et maintenant » local et temporel à « l'ici et maintenant » non-local et atemporel - en réalité sans transition, car ce qui est « hors du temps » ne peut être situé dans le temps -, adoptait le même mode de saisie de la pensée par objet alors... que la conscience n'est pas un objet !
Voyez la pièce manquante d'un puzzle délimitée par les pièces adjacentes. Posez le regard sur cet espace vide et voyez... comme une présence qui se dessine ! Cet espace n'est pas la pièce, c'est son absence, comme la vacuité l'absence de substance inhérente. Pourtant, vous ne pouvez pas vous empêcher de percevoir ce creux comme plein, ce « vide amodal » comme un «objet modal » ! « Il n'y a plus de consciences [individuelles], il y a une conscience [cosmique] » MIR.
Il en va de même avec cette « expérience du connaître » qui est au-delà de toute substantification (parler de l'impression qui s'empare de l'esprit est impropre... en l'absence d'individualité !), lorsque la dissolution de « l'effet de perspective » entraîne l'effondrement de l'émulation de la « conscience de soi ». « Cette entité était un tout en un et un en tout, un être à la fois infini et limité qui n'appartenait pas seulement à un continuum d'espace-temps mais faisait partie intégrante de l'ultime essence motrice du maelstrom éternel des forces de vie » DM-206.
Contrairement au réalisme de l'imaginaire lovecraftien, il est ici question de cela qui par essence est « libre d'assertion » et échappe par définition, ultimement, à toute qualification substantialiste, à toute catégorie identitaire, à toute conception entitaire, unitaire et globale. L'emploi d'un vocabulaire qui le définit comme « Un » ou comme « Tout » signifie soit la non-reconnaissance de la vacuité, soit que cela dont l'essence est amodale ne peut être ni défini, ni même saisit sous la « perception directe yogique » (laquelle exclut tout assujettissement à l'emprise de la saisie du soi de la personne et du soi des phénomènes), autrement que... sous une perspective modale ? « Sahara chante : le monde n'est que conscience et personne ne peut comprendre la non conscience » LGSE.
D'où le danger pour l'esprit voilée par l'ignorance de se laisser abuser par un biais de confirmation qui l'entraîne à voir dans un discours parlant du « divin », de la « source », de «conscience cosmique », la preuve de l'existence nouménale et transcendante de ce qu'il décrit sans discerner (par manque d'esprit critique) que le caractère substantialiste de cette formule (de sens interprétative et non définitive) est incompatible avec l'essence « libre d'assertion » de toute choses !
La conscience individuelle est la conscience absolue.
Mais lorsque la conscience apparaît duelle et que cette dualité est recouverte du voile de l'illusion, la conscience se fragmente encore...
Ainsi, toutes les positions philosophiques apparaissent comme des rôles joués par la conscience absolue LGSE

Il ne suffit pas de faire l'expérience du sentiment océanique (l'impression de faire un avec toutes choses) pour que la conscience soit totalement décohérée de l'effet de perspective qui la fait se percevoir « consciente de soi ». Lorsque la conscience individuelle s'efface, le sentiment de «présence globale » qui s'installe n'est pas la preuve d'une réalité sous-jacente. Voir dans ce « vide amodal » un existant thétique est une impression dualiste, obstructive de la non-dualité, qui s'oppose à la vue sans obstruction de l'ainsité.
Tant que nous voyons le pur et l'impur comme opposés, pensons nécessaire l'usage assidu des rituels et des chants de mantras pour purifier nos négativités, concevons essentiel d'abandonner les non-vertus et de cultiver les « vertus transcendantes » dans l'effort joyeux et avec une foi irréductible, jugeons que la « précieuse vie humaine » prime sur le sensible, et que nous croyons dans la transmutation de notre corps grossier en un corps de Bouddha par les pratiques avancées des tantras... nous ne faisons qu'entretenir la dualité et nous maintenir éloignés de la présence spontanée, simple et directe ! « La véritable simplicité est quelque chose de très difficile, parce que c'est nous qui sommes compliqués, et c'est difficile pour quelque chose de compliqué d'être vraiment simple[vii] ».
Que de complications, de détours et d'efforts pour aboutir... à ce qui est déjà là !
Cela ne veut pas dire qu'il faille tout abandonner, sous-entendu parce que les sutras et les tantras seraient inefficaces ! Non ! Le pouvoir du Vajrayana permet, par la manipulation des énergies internes subtiles qui structurent le corps, de préparer le pratiquant à réaliser l'Éveil au moment du processus de la mort. La méditation du « Calme mental » établit l'esprit en « équilibre méditatif semblable à l'espace ». A l'appui d'un procédé analytique, la « vision Supérieure » permet d'établir la démonstration logique de l'inexistence du soi de la personne (no vidyate) et du soi des phénomènes... Cela veut seulement dire qu'il y a une dimension trop mentale dans la façon dont la philosophie bouddhiste tibétaine est enseignée et dans la manière dont, en tant qu'élèves, nous la mettons en pratique. Parce que ces voies tirent précisément leur efficacité de la dualité, c.à.d. de la croyance en l'existence substantielle et autonomes des choses !
Si l'on veut déplacer une lourde pierre, il est tout à fait pertinent d'utiliser un levier solide à l'appui d'un sol ferme, chose autrement impossible avec un levier souple à la surface de l'eau, même pour déplacer un fétu de paille... Il n'est pas non plus paradoxal de chercher à faire comprendre que ce sol, dont a préalablement posé la solidité, est de la nature d'une illusion en s'appliquant à établir la démonstration que « la pensée de la solidité » est... elle-même pareille à une illusion !
Pris dans les mailles du filet, le poisson ne cherche pas à débattre, il se débat naturellement par réflexe ! Ce n'est pas une mauvaise attitude, mais en cherchant à se libérer, il s'enroule toujours plus et resserre davantage ses liens... Peut-être ses efforts lui permettront-ils au bout du compte de se libérer ? Toutefois, il y a un moment sur le chemin spirituel où la marche finit par s'abstraire du marcheur, la pensée du penseur, et où le chemin lui-même finit par se dissoudre pour laisser place à un flux dans lequel toutes choses apparaissent sans obstruction...
Lorsque ce moment survient (sans qu'il ne soit possible de le localiser dans le temps, le sentiment de son écoulement se délitant avec lui), il ne fait plus sens pour Sisyphe de gravir la montagne avec son rocher pour vouloir l'y amener au sommet... Car, le rocher, la montagne, son corps (et y compris son propre esprit) n'apparaissent plus à Sisyphe comme des « existants premiers », substantiels et autonomes, mais comme fondus dans l'essence de toutes choses, séparables seulement en apparence, sans discontinuité ultime ni obstruction relative...
Lorsque tout apparaît en coémergence à l'esprit, opposer le pur et l'impur, le vrai et le non vrai, le réel et l'irréel, en contraires sur une base substantialiste, ne fait plus sens car tout se révèle simples modalités de l'expérience du connaître...
Permettez simplement à l'esprit de reposer directement dans la pensée quand a lieu l'activité mentale, et dans l'absence de pensées quand vous ne pensez pas, ça y est !
Certains grands méditant ne regardent pas leur esprit qui pense mais regardent constamment les objets de leurs pensées. Ce n'est pas la vue authentique ; c'est une vue dualiste. Vous devez vous déposer dans celui-là même qui pense, et le regarder, ça y est !
N'allez pas vers l'extérieur pourchasser les perceptions. Et n'intériorisez pas les choses. Demeurez simplement dans l'inséparabilité des perceptions et de l'esprit
https://www.lotsawahouse.org/fr/tibetan-masters/patrul-rinpoche/self-liberating-meditation

Toute chose étant de la même essence, il n'y a pas de « saut quantique » qui permette de passer de la compréhension intellectuelle de la vacuité à sa « saisie directe ». Il n'y a ni transition, ni obstruction, entre ce qui est d'une seule et même essence, dont l'ontologie est «libre d'assertion ». Réaliser la vacuité consiste à simplement reconnaître que les mots et les symboles, la pensée logique et la raison pure, à l'instar de l'agent et de l'esprit, sont vides de substance !
S'agissant de la compassion, l'approche diffère. La « compassion universelle » - le souhait que tous les êtres sans exception soient libérés de la souffrance - ne s'établit pas sur la base de la compréhension de la vacuité (de la dualité) de l'identité à l'altérité, mais sur la « saisie directe » de leur unité sans obstruction dans laquelle l'individualité et la totalité se dissolvent l'un dans l'autre...
Il y a deux « esprits d'Éveil » (bodhicitta), en intention (d'aspiration) et en action (d'engagement ou d'action), lesquels correspondent... aux « modes d'expérience » du connaître, la conscience intentionnelle et la conscience spontanée, la première étant la base de la seconde comme la compréhension intellectuelle de la vacuité le vecteur relatif par lequel reconnaître son sens ultime.
Sous cette distinction, la technique des « sept causes et effet » d'Atisha et le tonglen de Shantidéva visent à faire germer l'intention compassionnelle, à travers l'équanimité (reconnaître tous les êtres comme nos mères), l'égalisation, et l'échange entre soi et les autres, tandis que l'éclosion proprement dite de la « compassion universelle spontanée » procède de la reconnaissance de la vacuité de l'individualité et de l'altérité, laquelle ouvre par la dissolution de toutes frontières égocentrées et de toutes différences hétérogènes sur un espace où coïncident sans obstruction l'un et le tout dans leur vide d'être...
Pour autant, l'intention n'amène pas à la spontanéité, elle oriente son caractère ! Entre la pleine présence qui abstrait le « marcheur » de l'action de marcher et de la montagne sur laquelle il marche, versus la pleine présence au groupe dans laquelle tous les « marcheurs » s'abstraient ensemble de l'action de marcher sur la montagne, se mesure la différence entre l'ouverture sur l'espace sans obstruction où toute distinction est abolie avec l'esprit (en coémergence aux apparences), et l'ouverture sur l'altérité sans fragmentation où toute distinction est abolie avec l'identité(de « l'un » au « tout »), lesquelles distinguent le développement de « l'esprit d'Éveil en intention » de la recherche du bonheur personnel, c.à.d. la voie du Mahāyāna versus la voie du Hīnayāna...
S'appuyer sur les opposés (c.à.d. opposer les apparences) est un moyen et non une fin. L'on a besoin du relatif pour réaliser l'ultime, de l'expérience du monde pour reconnaître l'esprit, mais à trop s'arcbouter sur le conventionnel et à trop s'adosser sur la dualité, l'on en vient à oublier ce qui le justifie, « dépasser les contraires » ! Si au sommet de son saut, le perchiste ne lâche pas sa perche, il ne peut franchir l'obstacle. Ériger la primauté du pur et rejeter l'impur, ordonner les actes vertueux et condamner les actes non vertueux, promouvoir les pratiques rituelles et déprécier les activités mondaines, ériger l'enseignement du Dharma et honnir la sensibilité aux dharmas, contreviennent à une intentionnalité tournée vers « l'esprit d'Éveil » en nourrissant l'intention de contrôle (le mental-ego) qui maintient liés au samsāra, encapsulée dans le désir-attachement de s'en libérer !
L'eau versée dans l'eau n'a qu'une saveur unique. Reconnais les qualités et défauts comme identiques, car ils se touchent LGSE
Autrement dit, c'est s'éloigner de « la voie du milieu » et tomber dans l'extrême que d'ériger la libération (le nirvāṇa et l'Éveil) en objectif, en se laissant subjuguer par une « expérience du connaître » cadenassée (non pas vidée, puisque toute expérience est par nature sensible, mais contrôlée par le mental-ego) de sa dimension sensible, par l'austérité de pratiques rituelles postulées comme étant la condition nécessaire de l'atteinte du salut.
Comme si en consacrant l'entièreté de son existence à expurger de sa vie tout « ce qui n'est pas Dharma », l'on faisait naître les « conditions propices » à (la réception de) son enseignement, de sa pratique, de son édification dans l'esprit, ce qui implique par voie de causalité de l'expurgation de ses négativités ! Face à ce biais, l'on ne peut que rappeler à l'usage raisonné de l'esprit critique.
Sous la vue partiale de la dualité et du biais du substantialisme, le « sentiment esthétique » surgit de causes et de conditions. La chose vue, entendue, sentie ou représentée doit être pure en son substrat intrinsèque et autonome pour que la sensation et la pensée soient corrélativement pures. Lorsque la vacuité des apparences est reconnue en coémergence à la vacuité de l'esprit, l'objet se vide de toutes qualités et le sentiment esthétique, indivis de la conscience, se révèle sans obstruction. Alors, grossier et subtil, bien et mal, spirituel et mondain, Dharma et dharma, passions et sagesses, ont un « goût unique » ! La véritable pureté est l'ontologie de l'être, ni existant ni non-existant, cela ne peut être souillé par ce qui n'est ni pur ni impur ! Le miroir n'est pas affecté par ce qu'il reflète... Il n'y a rien à purifier, seulement à reconnaître la vacuité de toute assertion, l'essence de la conscience depuis toujours « libre d'assertion ».

Méfie-toi des extrêmes, recherche l'équilibre. Là se situe le juste milieu :
« Jouis du monde sensible sans être réduit par la sensorialité » LGSE,
Jouis de la pratique du Dharma sans te contraindre à la célérité ;
« Cueille la fleur de lotus sans créer d'ondes sur l'eau » LGSE,
Moissonne les champs de l'esprit sans y creuser de sillons ;
« L'acte ne trouve sa légèreté qu'au moment où le sensible s'éteint » LGSE,
Et les dharmas leur pureté qu'au moment où le Dharma s'abstrait.
Namasté
Tashi delek
བཀྲ་ཤིས་བདེ་ལེགས།
Références :
DM : Démons et merveilles, HP Lovecraft https://www.babelio.com/livres/Lovecraft-Demons-et-merveilles/3863
KAL : Kalama Sutta https://www.canonpali.org/tipitaka/suttapitaka/anguttara/an03-065.html
LCEA : La conscience comme existence absolue https://www.cairn.info/sartre-conscience-ego-et-psyche--9782130508243-page-27.htm
LGSE : Le grand sommeil des éveillés, Daniel ODIER https://www.leslibraires.fr/personne/daniel-odier/79231/
MIR : Maya, L'illusion de la séparation, Daniel ODIER https://www.youtube.com/watch?v=5Bmx5q08yMo
NEV : Non-dualité https://www.youtube.com/watch?v=0UWXDiCuu8I
NDV : Nagarjuna est la doctrine de la vacuité https://www.decitre.fr/livres/nagarjuna-et-la-doctrine-de-la-vacuite-9782226122278.html
LPJ : Les portes de la joie, Daniel ODIER https://www.leslibraires.fr/livre/6348219-19-meditations-pour-vivre-sans-entraves-les-p--daniel-odier-pocket
RL : Rayons de Lune, les étapes de la méditation du Mahāmudrā https://www.padmakara.com/livres-numeriques/196-rayons-de-lune-ebook-format-pdf-9782370410139.html?search_query=rayons+de+lune&results=5
[i] https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89pist%C3%A9mologie
[ii] IBID.
[iii] https://nospensees.fr/descartes-et-la-certitude-de-la-conscience-de-soi/
[v] Nature https://fr.wikipedia.org/wiki/Nature
[vi] https://www.podcastscience.fm/dossiers/2011/01/06/dossier-les-constantes-fondamentales-de-lunivers/