II.3 - Poétique de l'ainsité

05/03/2023

Retrouvez ici les poésies de l'ainsité de II.14 à II.21 - Mahāmudrā

                                                               Mahāmudrā 

II.14 Sable

Les vagues recouvrent les pas sur le sable,

Le ciel gomme les sillons des dirigeables.


Sur aucun aspect, l'attention ne réside,

Sans contrainte, s'écoule l'instant du vide.


Sur la paroi des falaises de l'abstraction,

L'esprit est libre de tout point de fixation.


Vie et conscience sont un fleuve continu,

L'espace se déverse en son propre contenu.


La conscience quitte la plaine de l'instant,

Volent les pétales sur le souffle du vent.


Sur la toile spatiale, s'enfuient les contours,

D'ombres astrales au fusain du contre-jour.


Lobsang TAMCHEU 

II.15 Miroir

La distance relative entre reflet et miroir,

Soustraite de la confusion de la carte versus le territoire.


L'absence de durée du projecteur à la projection,

Réduite de la dualité du mouvement à l'observation.


Le vide ultime entre la lumière et la composition,

La coémergence du connaisseur à l'action.


Sans obstruction de la réflexion au réflecteur,

Sans discontinuité de l'expérience à l'acteur.


Embrasser l'espace dans le miroir de la vacuité,

Où réside sans essence le vide incomposé.


Étreindre toutes choses en une infinie osmose,

Des apparences à l'esprit, l'anamorphose.


Lobsang TAMCHEU 

Compléments à Miroir 


« Tous les phénomènes sont comme des oiseaux qui traversent l'espace.

À cet instant, cela a du sens de rechercher l'essence de l'esprit.

Lorsque vous regardez l'esprit, il n'y a rien à voir.

Dans ce « rien à voir » vous verrez le sens profond.

La vue suprême est au-delà de toute dualité sujet-objet.

La méditation suprême est sans méditation.

L'activité suprême est sans action » IDC-65

II.16 Réaliser

L'ignores-tu vraiment, cette réalisation dont tu es en quête,

A cet instant, tu l'expérimentes de manière concrète !


Réaliser, c'est « rendre réelle » l'existence d'une chose,

En même temps que la conscience qui l'appose !


En dehors de la relativité, nulle substance autonome,

Rien n'existe qui ne soit l'expérience d'un axiome !


Le moment de l'épreuve est le présent de l'esprit,

En milliers d'instants, la conscience se produit !


Vrai et non vrai, le langage substantifie le pur et l'impur,

Des opposés la sagesse démythifie la nature !


Dans le « miroir de la vacuité » du samsāra,

Se reflète la conscience réalisée du nirvāṇa !


Lobsang TAMCHEU 

Compléments à Réaliser


« Le fruit suprême est dépourvu d'espoir et de peur.

La vision suprême est sans point de référence.

La méditation suprême est au-delà de l'esprit conceptuel.

La pratique suprême est celle qui ne fait rien.

Le fruit suprême échappe à tous les extrêmes.

Si vous réalisez cela, l'illumination est atteinte » IDC-65

II.17 Vérité

Accepte la vérité, c'est qu'elle ne peut s'enseigner,

Cesse de conjecturer, instruis-toi plutôt à douter !


Tu cherches un maître pour t'enseigner le chemin,

Sans voir que le chemin est ton maître adamantin !


Tu convoites la certitude pour obtenir l'adhésion,

Et tu te retrouves sur le terrain de la confrontation !


Tu prônes le retrait du monde comme acceptation,

Le champ de bataille du yoga est ton absolution !


Lorsque tes croyances s'ouvrent sur un précipice,

Que dans ta chute disparaît la peur extinctrice,


Délié du temps, tu te fonds ainsi dans la vastitude,

Et du connaître, réalise l'impalpable concrétude !


Lobsang TAMCHEU 

II.18 Temps

L'esprit ne peut ni ralentir, ni stopper le temps,

Et pourtant, c'est lui qui le met en mouvement !


Le temps est une dimension de l'expérience,

Comment pourrait-il s'abstraire de la conscience ?


Tout découle du temps sans avoir de précédent,

Connaître est « l'acte momentané » de l'instant !


Chaque chose occupe l'espace de son expansion,

Sous la forme d'apparences sans obstruction !


Le mouvement masque des rails la finitude,

Le train du temps efface du passage l'interlude !


Sous la perspective du connaître surgit le sentiment,

Que la conscience de soi transcende le temps !


Lobsang TAMCHEU 

II.19 Objet

Voyant tous la même chose, nous la disons unique,

Partager la même vision la rend-t-elle identique ?


Pour tous, le « vert » est l'objet d'une même couleur,

Et chacun, de ce même objet, est l'unique auteur !


Là où se porte le regard, nulle chose que l'espace,

Sous la forme, l'épaisseur des vues qui s'enlacent !


Le reflet du monde est le miroir de l'observateur,

De son expérience, la conscience est le seul créateur !


Nous ne vivons pas dans un univers qui nous contient,

Nous sommes d'une même histoire différents écrivains !


Dans son flux, la conscience manifeste l'acte du monde,

Les vagues de l'expérience dessinent, de l'esprit, les ondes !


Lobsang TAMCHEU 

II.20 Vraisemblance

La « véracité du vrai » est par nature implicite,

Pourquoi mettre en doute un accord tacite ?


Un fait est à lui seul une preuve authentique,

Comment l'évident serait-il œuvre synthétique ?


Les ombres sur la paroi de la caverne sont projetées,

Même l'artifice du faux ne se présente pas masqué !


Pourtant, insatisfaits, toujours nous cherchons crédules,

Continuant d'avancer sachant que l'horizon recule !


La preuve du vrai ne réside pas dans le mystère caché,

Hors de la simulation point de vérité qui ne soit simulée !


La couleur est dans la lumière, non dans le diamant,

Irradiant l'espace, de la conscience surgit l'apparent !


Lobsang TAMCHEU 

II.21 Actes

Nous en faisons l'expérience non parce que la chose existe,

Hors de la question, nulle réponse autre que relativiste !


Sans substance, cela existe seulement parce que l'on y croit,

Connaître, c'est rendre réel comme monde l'objet de sa foi !


Mais comment croire puisque le vide est essence ?

Poser une assertion, c'est réfuter son inexistence !


Nul ne peut capturer l'espace dans le creux d'une main,

Mais sans l'espace, sur quoi replier la main ?


Nulle hypothèse en dehors de ce qui apparaît ici actuel,

La présence en conscience est inconditionnelle !


Ici et maintenant, tout ce qui est et n'est pas possible,

De la non-dualité, la conscience est la flèche, le tireur et la cible !


Lobsang TAMCHEU