
II.1 - Poétique de l'ainsité
Retrouvez ici les poésies de l'ainsité de II.1 à II.10 - « N'ayez pas peur »

N'ayez pas peur
II.1 Emancipation
Vis ta « foi sans support », pratique sans idolâtrer,
Pour toucher le cœur dépasse le sacré.
La plume n'a pas besoin d'aile pour voler,
Le vent est à lui-même sa propre portée !
Tant qu'il reste sur la branche, l'oiseau s'appauvrit,
Dépouille-toi de tout support Ô mon esprit !
Au Nord de la Terre, nul besoin de boussole,
Le centre de l'espace est partout la coupole !
La voie n'est pas le contrôle, mais la confluence,
La voie n'est pas une voie, c'est la présence !
Ne craint pas d'être fragmenté, car tu es « tout » !
Ne désire pas ce que tu es déjà, car « l'un » est tout !
Lobsang TAMCHEU
Compléments à Emancipation
« Vous pouvez réciter des mantra, accomplir des rituels,
Connaître la totalité des enseignements,
Toutes les écoles philosophiques et leurs théories,
Mais cela ne vous fera pas réaliser Mahāmudrā , la nature de l'esprit
Attachés à vos points de vue,
Vous ne faites qu'obscurcir la claire lumière de votre esprit.
Respecter des voeux qui ne sont rien d'autre que des concepts,
Blesse d'une manière ultime votre pratique spirituelle.
Restez libres de toute élaboration mentale,
Libre de considération pour vous-mêmes,
Comme les vagues de l'Océan, naissant et mourant spontanément,
Sans concepts, sans attachement à aucun point de vue,
Dans la pureté primordiale de l'esprit,
Comme une seule lueur qui dissipe l'obscurité,
Et d'un coup vous réaliserez les enseignements des sûtra, des tantra
Et de toutes les écritures » IDC-64.
II.2 Corps
Véhicule mécanique sans volonté,
Simple radeau à l'usage de traversée.
La philosophie les oppose en nature,
Trace entre eux une ligne de fracture.
L'esprit commande le corps comme un pantin,
Obéissant, ils ne font qu'un, deux si mutin !
Relatif, le mouvement apparaît objet,
Par-delà cette illusion nul soi concret !
Sillages dans le ciel de l'expérience,
Modalités que revêtent l'existence !
Sans division, sans union, est la réalité,
Le reflet et le miroir sont la déité !
Lobsang TAMCHEU
II.3 Je suis
Ici et maintenant, je le dis « je suis Bouddha »,
S'agissant d'une assertion, je ne le suis pas !
Affirmation locale et temporelle,
Simple désignation conditionnelle !
Le flux qui se pense sujet de l'expérience,
A son propre objet est en dépendance !
Il n'y a rien à rejeter ou à unir,
Pas même les contraires à abolir !
Il n'y a rien à infirmer ou affirmer,
Pas même des choses la relativité !
En ce non-instant, l'expérience spontanée,
Est d'être Bouddha,
incomposé inné !
Lobsang TAMCHEU
II.4 Spontané
Dans la conscience, il n'y a ni apparition, ni disparition,
Un « effet de perspective » est une simple observation.
Ce qui est dépourvu de la capacité ne peut connaître,
Ce qui ne saisit pas l'évidence ne peut disparaître.
Ce qui est pur par essence ne peut être souillé,
Pourquoi donc vouloir purifier la vacuité ?
L'intentionnel ne nait pas spontané,
L'Hermétique ne devient pas raisonné.
L'essence de la fleur n'est pas dans la bouture,
Au-delà de la nature, rien ne change de nature.
L'horizon est une ligne dessinée par l'intention,
Dans l'espace sans repli, seule préside l'action !
II.5 Carte
Poisson est un mot qui ne peuple pas les eaux,
L'espace n'est pas captif des mailles de l'écheveau.
Les pêcheurs débattent jusqu'à la fin des temps,
Du vide, leurs débats se font le carcan.
Sans intérieur, les idées ne recouvrent nul extérieur,
Le « dire » n'est pas le reflet d'un état antérieur.
Dans le « miroir de la vacuité », le réel s'évide,
L'indicible ne peut se dire, des mots est apatride.
Un membre fantôme ne jette pas d'ombre au sol,
Sa douleur dans l'esprit danse la farandole.
Tout est « libre d'assertion », il n'y a plus à débattre,
En l'absence de territoire, qui a besoin de carte ?
II.6 Méditer
Prenez conscience de tout ce qui se produit,
Respirez, marchez, arrêtez-vous, avec l'esprit...
Les choses et leur pensée, tels des hologrammes,
Transparents et vides, incomposés mais présents.
Entre le sol et vos pieds, aucune séparation,
Tout est de la nature de l'espace, sans obstruction !
Sans distance ni durée, distingues-tu la césure ?
Lorsque la localité s'évanouit, plus de fracture !
Le monde et le corps se coulent dans la conscience,
Ensembles forment le cœur indicible de l'expérience !
Le multiple se fond dans l'un, l'un se fond dans le vide,
A l'identique indifférencié, la conscience coïncide !
II.7 Espace
Dépourvu de périphérie et de centre,
L'espace s'étend sans épicentre.
Les mailles du filet sont tissées de vacuité,
Entre quoi le vide est-il donc entrelacé ?
Un hologramme n'est d'aucun lieu ni de temps,
Qui « du reflet dans un reflet » est l'artisan ?
De face, un stupa vers le ciel s'élance,
De là-haut, sur un seul plan nulle variance !
Sans contour, sur quoi superposer la forme ?
Sans durée, mesurer ce qui se transforme ?
Sous le reflux des vagues, l'espace se déplie,
A la surface de l'océan disparaît l'arythmie.
II.8 Opposés
Pour méditer sur la mort, pourquoi s'écœurer de son corps ?
La nature des bardos est de conscience, non pas d'or !
Pour cultiver le renoncement, décrier le samsāra ?
Tel un reflet, un joyau factice ne vaut pas un carra !
Priser la « précieuse vie humaine » par le rejet du sensible ?
De ses propres bras, la pieuvre ne se fait pas la cible !
De ses « trois portes » sans repos œuvrer la purification ?
L'eau efface-t-elle du miroir la trace d'une réflexion ?
Pour former sa compassion, voir autrui comme sa mère,
C'est encore opposer l'autre en une vue contraire !
Pour enseigner le Dharma, pourquoi s'isoler de la vie ?
Toute est conscience et le Dharma est l'esprit !
II.9 Evidence
S'abstraire de la localité et se fondre dans la totalité,
S'ouvrir à l'infini et du fini, à jamais, se détacher,
S'extraire de la temporalité pour s'écouler sans durée,
Dans l'instant s'absorber jusqu'à rejoindre l'éternité,
Se soustraire de l'identité pour s'absorber dans l'unité,
Se désunir du singulier et dans la multitude fusionner,
Dépasser la non-dualité et s'expandre dans la vacuité,
Où « soi » et « autre », ne fait plus sens d'opposer,
Toutes les choses d'une seule chose sont l'essence,
Tous les êtres de l'être forment l'existence,
Révèle l'évidence tel un diamant étincelant,
L'esprit est la vague, l'onde des flots et l'océan !
II.10 Voie
Observe l'espace à l'appui de la respiration,
Observe l'esprit dans l'espace de la méditation.
Saisit toutes choses comme expérience,
Embrasse toutes vies comme conscience.
Cachée et évidente, simple et sibylline,
Séparée et inséparable, indicible et opaline.
Une seule chose y mène, le non agissement,
Un seul entraînement, l'absence d'entraînement.
L'inspiration naturelle est l'acte du reconnaître,
Dans son expiration l'intuition spatiale de l'être !
Un seul mode révèle la grâce de la réalité,
L'élégance de la spontanéité !